L’Europe qui perd les pédales : les raisons de la déroute de l’Exécutif européen (2)

L’Exécutif Européen est en pleine déroute, au point qu’on commence à parler de crise, démissions ou censure !

Une Europe qui perd les pédales , mais que se passe-t-il donc à Bruxelles (2)


L’Exécutif européen accumule bévues et faux-pas

En quelques semaines, le peu de crédit dont disposait encore la Commission européenne, malgré son inaction au début de la pandémie du Covid19, s’est envolé en fumée. Les critiques les plus dures sont venues de là où on ne l’attendait pas, de la presse allemande comme Der Spiegel et des leaders politiques proches d’Angela Merkel, comme le puissant Wolfgang Schäuble le Président du Parlement allemand.

Que s’est-il donc passé ?

La gestion catastrophique des commandes de vaccins pour les pays de l’UE a été dénoncé tant pour les retards de livraisons qui mettent l’UE dans son ensemble à 3 mois de retard minimum par rapport au Royaume-Uni ( au rythme actuel, la vaccination ne serait pas achevé avant 2030 !!) que pour le manque de transparence dans des contrats ne prévoyant aucune sanction en cas de retard. On avait déjà connu l’épisode de la dissimulation des prix auxquels les vaccins avaient été commandés (dévoilés par un tweet en « acte manqué » d’une Ministre belge ). On a vu après l’Exécutif européen, paniqué, se ridiculiser en publiant le contenu des contrats avec 2/3 des paragraphes « grisés », c’est-à-dire biffer pour les rendre illisibles pour respecter une clause « de confidentialité ».. Les mêmes contrats, également « grisés » avaient été montrés quelques jours auparavant à des Parlementaires européens, pendant 45 minutes maximum sans possibilité d’en faire des copie. Si le ridicule tuait..

Piquée au vif, Ursula Von der Leyen a décidé toute seule d’interdire toute exportation de vaccins produits dans l’UE vers le Royaume-Uni, y compris à partir de la République d’Irlande vers l’Irlande du nord, an contradiction totale avec l’accord sur le BREXIT signé quelques semaines auparavant. Cette mesure insensée à réussi à coaliser contre elle l’ensemble de la classe politique, médias et opinions publiques britanniques et irlandaises. Il s’en est fallu de peu même qu’elle rallume la mèche du conflit nord-irlandais quand des Unionistes de Belfast ont proféré des menaces de mort contre les douaniers. Ursula Von der Leyen a immédiatement fait machine arrière en prétextant une erreur de ses services…

En cette mi-février, Ursula Von der Leyen, ne reculant devant rien, a jeté le douté sur l’efficacité des vaccins russes alors que de plus en plus de pays européens, devant la pénurie orchestrée par les commandes de Bruxelles se sont montrées intéressées par l’offre de Moscou. La Hongrie en a déjà commandé, la  Croatie et Slovaquie ont annoncé des commandes, et même l’Allemagne est prête à franchir le pas. Ne craignant pas le ridicule alors que l’UE est montrée du doigt pour ses retards à vacciner dans le monde entier (à l’heure où j’écris ces lignes, il y a plus de vaccinés au Royaume-Uni que dans toute l’UE des 27 ) . La Russie n’a certes vacciné qu’un peu plus de  4 millions de personnes pour les 2 doses, mais c’est plus que la moyenne de l’UE.  C’est en s’appuyant sur des chiffres tronquées, que Madame Von der Leyen a essayé de décrédibilisé le vaccin russe : « s’il était si efficace , pourquoi ne vaccinent-ils pas plus leur population ». ils e trouve qu’en Russie, comme dans de nombreux pays, la vaccination n’est pas obligatoire et que beaucoup de gens sont réticents. L’histoire de « la paille et de la poutre » !

Moscou-Pékin : deux poids, deux mesures :

Dans cette course aux vaccins, la mission début février à Moscou de Joseph Borrel, le haut Représentant pour la politique étrangère et de sécurité communes de l’UE a été un summum dans l’improvisation et le ridicule. Mal préparée, cette mission a vite tourné au fiasco. Sur les vaccins, Joseph Borrel a indiqué l’intérêt de l’Europe, pour être démenti quelques jours plus tard par Ursula Von der Leyen . l’autre objet de sa mission était de demander la libération de l’opposant Navalny. Les médias russes se sont bien gaussés sur l’incongruité de confier cette mission à un Homme qui a justifié l’arrestation, la condamnation à de lourdes peines de prison ses compatriotes catalans dont le seul crime avait été d’organiser un référendum sur l’indépendance voulu par une majorité de citoyens. Non seulement son homologue russe lui a proposé de se rendre auprès de la Cour de justice russe qui jugeait Navalny pour une affaire de fraude financière (justifiée ou pas) , mais a fait expulser 3 diplomates européens qui avaient suivi les manifestations d’opposants à Moscou. Et maintenant, Bruxelles ne parle plus que de sanctions contre Moscou.

La colère de Bruxelles vis-à-vis de Moscou est d’autant moins crédible et honnête que, dans le même temps, la lune de miel entre Bruxelles et Pékin se poursuit. On attend toujours une mission de Joseph Borrel auprès du dictateur rouge XI-Jinping pour demander la libération des millions d’Ouighours, Tibétains, démocrates de HongKong et autres opposants ! Pour un grand nombre d’entre eux d’ailleurs c’est bien tard, car ils sont été torturés et assassinés !

En catimini, aux ordres de l’industrie allemande, Ursula Von der Leyen a fait signer aux 27 un accord sur la protection des « investissements » accordant des privilèges exorbitants à la Chine : libre accès au marché européen, autorisation de détachement de leurs ingénieurs et experts pour 3 ans sans contraintes, aucun contrôle sur le dumping des entreprises chinoises pour s’approprier les grands marchés de travaux en Europe… pratiquement sans aucunes contreparties, autres qu’une vague déclaration qu’un jour peut-être le PC chinois pourrait ratifier une vague convention interdisant le travail forcé, mais sans aucune précision sur la daté de mise en œuvre et aucune garantie sur la mise en œuvre !

La Bureaucratie européenne a inventé un nouveau concept : la Taxonomie

Mais dans le silence du télétravail et des bureaux déserts, la bureaucratie européenne a inventé un nouveau concept barbare baptisé « Taxonomie » qui va permettre à des armées de fonctionnaires, sans aucun contrôle parlementaire, ni d’organisations de la société civile et professionnelle, de décider quelles activités sont « vertes » et lesquelles sont « nocives pour l’environnement ». Ces dernières se verront couper de tout financement public, de prêts à des conditions intéressantes, de contrats d’assurances avantageux (voir mes articles sur la Taxonomie sur mon Blog) . Les aides européennes seront refusées, même celles du plan de relance , à ces « moutons noirs ». Mais si nul ne peut contester la nécessité d’œuvrer contre le réchauffement climatique et la biodiversité, va-t-on accepter de condamner dans l’UE des activités allant des cimenteries aux industries du bois, du textile-habillement à l’élevage, ne plus construire de barrages hydroélectriques ;ni retenues d’eau pour l’irrigation pour ne prendre que quelques exemples ? L’application sans nuances ni périodes de transition par une technocratie verte de ces mesures va conduire à la disparition de dizaines de milliers de petites entreprises européennes, de centaines de milliers d’emplois, en faveur, une fois de plus, des importations asiatiques et des grands groupes qui y sont installés

Un débat tronqué

Dernière trouvaille de Bruxelles : interdire un véritable débat sur son avenir ! Alors qu’une Conférence pour débattre du futur de l’Europe aurait dû s’ouvrir en 2020, son ouverture, retardée en mai 2021 à cause du COVID, se fera en quasi huis-clos : les représentants des parlements nationaux ne seront là qu’au titre d’observateurs, la société civile n’y sera pas conviée en dehors de 2 ou 3 consultations bidons d’ONG bruxelloises largement arrosées par les services de Bruxelles. Le tout devra accoucher d’un projet pour le printemps prochain, juste à temps pour servir de tremplin électoral au Président français Emmanuel macron !

On ne peut qu’espérer que les parlementaires européens, qui participeront quand même à cette conférence, vont se rebiffer !

Comment en-est-on arrivé là ? Je voudrais donner quelques explications sur cette  « descente aux enfers » aussi rapide qu’étonnante :

  • Depuis mars dernier, La Commission européenne est en réalité à l’arrêt car 90 à 99% des effectifs selon les périodes  sont confinés chez eux de gré ou de force en télétravail. Des agents se trouvent à des milliers de kilomètres de Bruxelles dans leur pays respectifs. Difficile de faire fonctionner la chaine hiérarchique de directions composées de fonctionnaires résidant aux quatre coins de l’Europe. Ce qu’il faut bien comprendre, c’est que les Institutions européennes fonctionnent comme des administrations où la chaine hiérarchique est fondamentale. En tant que Président d’une d’entre elles, je me souviens de bordereaux de signatures qui m’étaient soumis avec 26 noms avant le mien. !
  • Si l’administration est ainsi désorganisée, elle est devenue aussi refermée sur elle-même ! Sans visiteurs, sans possibilité réelle pour le Parlement européen, seule Institution à essayer de travailler normalement, d’exercer ses prérogatives de contrôles ! Les experts des états participent à des réunions « en distanciel » qui limitent forcément les questions et facilitent les manipulations. Les acteurs de la société civile sont eux totalement désemparés, voient tomber des projets de lois venus de nulle part sans beaucoup de  possibilité d’interactions,
  • Il serait facile de tout mettre sur le dos de la pandémie. Dans cette tragédie, Ursula Von der Leyen s’est révélée fidèle à l’image (plutôt mauvaise ) qu’elle avait en Allemagne en tant que Ministre de la défense : autoritaire et ne s’appuyant que sur un tout petit noyau de fidèles. Devant les critiques sur la campagne de vaccination, elle n’a pas hésité à  faire porter la responsabilité sur sa collègue Commissaire chypriote puis sur son Vice-Président letton, sans jamais assumer elle-même les erreurs commises. Elle s’est même laissée aller à blâmer les fonctionnaires en charge du secteur de la santé en laissant entendre qu’ils étaient incompétents et sans qualification ! Quand le bateau tangue, est-ce qu’un vrai capitaine va blâmer les matelots ou les mousses ?
  • On se rend compte ainsi qu’il s’agit donc bien d’une « erreur de casting » que de nommer une femme sans charisme ni vision pour l’Europe à ce poste stratégique. Une erreur que l’on doit à Emmanuel Macron qui ne voulait pas du Président du principal groupe politique au Parlement européen , Manfred Weber, qui aurait dû occuper le poste selon le principe, certes contesté, du « Spitzenkandidat » ( attribuer le poste de Président de la Commission européen au candidat officiel du parti arrivé en tête aux élections européennes ). Cette opposition forcenée d’Emmanuel Macron  à Manfred Weber était un affront contre le Parlement européen qui le lui a bien rendu en éliminant sa candidate Sylvie Goulard au poste de commissaire française (remplacée par Thierry Breton) . Mais c’était surtout une mauvaise manière contre la démocratie.  Devant cette impasse, Angela Merkel en a profité pour « exfiltrer » à Bruxelles sa Ministre de la Défense très contestée et mêlée à des affaires obscures de trafic d’influence et abus de pouvoir…
  • Sur l’affaire de l’accord avec la Chine, on a vu Ursula Von der Leyen imposer une de ses compatriotes au poste de « Directrice Générale » du Commerce (DG Trade) pour négocier à l’arraché un accord qui ne satisfait finalement que les intérêts de l’Industrie allemande..
  • Plus largement, le système de Bruxelles, de plus en plus opaque et dirigé par de haut-fonctionnaires, souvent arrogants et « hors sol », trouve ses limites dès qu’il s’agit dans le « concret » comme on le voit avec l’affaire des « vaccins » ! Le système européen, à bout de souffle, semble prêt d’imploser :

Le temps du « crépuscule des Bureaucrates de Bruxelles » n’est-il pas arrivé  ?

Henri Malosse

Publié par HenriMalosse

Européen engagé et libre - Enseigne l'histoire de l'Europe - Chairman of TheVocalEurope -30ème Président du Comité Economique et Social Européen (2013-2015)

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